"Ah bon ? Vous faites des suivis à domicile aussi ?" Une question parfois posée par mes patients, lorsque je reviens, un peu en retard ou, je dois le reconnaître, un peu en sueur d'un entretien au domicile d'un patient (dont je reviens à pied, bien souvent). Car oui, il m'arrive d'intervenir directement au domicile principalement auprès de personnes âgées. C'est une clinique que j'apprécie tout particulièrement, même si elle peut-être parfois inconfortable, loin du cadre connu et serein de mon cabinet. Pourtant, elle a tellement de sens lorsqu'il s'agit d'accompagner une personne âgée, et certainement dans d'autres circonstances par ailleurs. Lorsqu'il y a vieillissement, il peut y avoir des défaillances, des pertes. Compensées par le domicile, celui-ci jouant alors le rôle d'une forme d'extension de la personne. Ces pertes peuvent être peu visibles ou peu dicibles en dehors de ce contexte. A l'inverse, elles peuvent être si visibles et si dicibles au cabinet, qu'elles ne permettent pas toujours un travail d'élaboration psychique. A la maison, les photos posées sur le buffet peuvent aider à se raconter à nouveau et le fait d'accueillir l'autre dans son propre espace permet de se sentir encore "capable de" ; pour se sentir suffisamment à l'équilibre dans la relation et évoquer ce qui fait mal. Le domicile est un élément intéressant du travail psychologique de la personne âgée. On éteint la télévision, le temps d'un instant, pour laisser place à la discussion, d'abord légère, puis plus précise et intime, cheminant doucement dans ce qui fait sens pour la personne et ce qu'elle souhaite. Car oui, elle souhaite. Et le domicile plus encore. Tant que je le peux, j'accompagne ces personnes à domicile, qui ont bien plus à dire et à travailler qu'on ne le pense et qui ne bénéficient pourtant que très peu de ce type d'accompagnement.